A ce jour, aucun candidat à la présidentielle française ne s’est explicitement déclaré en faveur d’une aide publique au développement (APD) avec pour seul et unique objectif le développement des pays les plus pauvres. E. Macron et F. Fillon se sont même prononcés pour son conditionnement à des accords de contrôle des migrations.
Partenariats économiques et politiques contre financements pour le développement : pourquoi serait-il problématique de conditionner l’aide aux intérêts des pays donateurs ? Principalement car elle doit être alignée sur les priorités des pays récipiendaires pour être vraiment efficace.
Découvrez comment ces apparents échanges de bons procédés grèvent en réalité le fonctionnement de l’APD.

 
Aide liée : les intérêts des entreprises françaises avant les intérêts économiques des pays en développement ?
 
L’aide liée désigne les dons ou prêts pour lesquels les marchés sont limités à des entreprises du pays donateur. Malgré l’intérêt de cette pratique pour les entreprises des pays donateurs, l’OCDE a rappelé qu’elle réduisait l’efficacité de l’aide au développement et désavantageait à la fois les pays récipiendaires et donateurs, en augmentant notamment jusqu’à 30% le coût des projets de développement
Délier l’aide permet d’augmenter l’autonomie des pays récipiendaires : en plus de diminuer les coûts des projets, cela leur permet de mieux définir les biens et services dont ils ont besoin, et surtout de permettre aux entreprises locales de participer aux projets de développement !

Et la France ? Aujourd’hui, elle fait partie des pays les plus vertueux de l’OCDE : l’aide liée ne représentait qu’un peu plus de 5% de son aide totale en 2010. Elle pourrait cependant faire encore mieux en séparant cette activité du décompte de son APD, à l’image du Royaume-Uni.

L’APD en passe de devenir un instrument de maîtrise des flux migratoires ?

En octobre dernier, l’Union Européenne a conclu un accord avec la Turquie prévoyant des financements pour 5 pays africains en contrepartie d’une amélioration de la surveillance de leurs frontières et de leur politique de retour.

Bien que ces fonds soient actuellement additionnels à l’APD de l’UE, certains veulent aller plus loin : Emmanuel Macron et François Fillon ont déclaré souhaiter conditionner l’octroi de l’APD à la coopération de ses récipiendaires sur un certain nombre de mesures pour limiter le nombre de départs de leurs ressortissants vers le sol français.

A une heure où les flux monétaires transférés par les migrants vers leur pays d’origine sont beaucoup plus élevés que les flux d’APD, doit-on rappeler que le but fondamental de cette aide devrait-être le développement ?

Le glissement d’une APD humanitaire vers une APD sécuritaire ?

Au-delà de la formation aux fonctions habituelles de police civile, l’OCDE travaille à une redéfinition de l’APD pour y inclure d’autres dépenses de sécurité : prévention de l’extrémisme violent, dépenses liées à l’engagement avec les forces de police, à la formation du personnel militaire sur des sujets liés au développement, dépenses d’équipement militaire utilisé dans le cadre d’opérations humanitaires… Or, le peu de preuves empiriques à court et moyen terme sur le lien entre les dépenses de sécurité et le développement économique du pays receveur empêche de les considérer comme de l’aide au développement. La comptabilisation de ces dépenses en tant qu’APD se fait donc au détriment de flux visant directement la lutte contre la pauvreté, la baisse des inégalités et le développement durable. Ce glissement annonce de plus un nouveau glissement de l’humanitaire vers le militaire, que nous dénonçons fermement.

Actuellement, la France semble soutenir cette mesure : nous demandons à la/au futur Président-e de s’y opposer formellement.

Vers plus de cohérence de la politique de développement française

L’impact des pays développés sur l’économie des pays en développement dépasse le cadre de l’APD.
En effet, les politiques migratoires et de défense, mais aussi commerciales, technologiques et environnementales mises en œuvre par les pays riches ont un effet direct sur la situation des pays pauvres. L’aide au développement est une composante de la politique de développement de la France, et ses citoyens sont fiers de l’octroi de ces financements pour sortir les pays défavorisés de l’extrême pauvreté. Lorsque les décideurs politiques utilisent cet instrument comme prolongement de leurs politiques économiques ou migratoires, ils trompent les contribuables de leur propre pays, les citoyens des pays en développement, et rendent l’aide octroyée inefficace et incohérente.

Que faire pour lutter contre ce dévoiement de l’aide publique au développement ?

Réagissons pour sauvegarder un des rares mécanismes de solidarité internationale et de lutte contre les inégalités économiques à l’échelle mondiale qui existent encore avant qu’il ne soit trop tard !
Partagez le comparateur des candidats à la présidentielle par mail et sur les réseaux sociaux et demandez aux candidats de s’engager pour une aide au développement efficace !